Mai 68.

Publié le par modem08

                                                                                 Lundi 12 mai 2008

S’il n’est pas bon de ne regarder qu’en arrière et de ne célébrer que des anniversaires, il est toujours indispensable de se souvenir et d’analyser ce qui s’est passé. En ce qui concerne mai 68, se souvenir peut aider à comprendre les évolutions qui se sont produites et qui sont encore en marche. J’avais juste vingt-quatre ans et je terminais mes études à HEC. Pour moi, le premier signal a été lors d’un examen écrit, quand un étudiant de ma promo a crié : «  Le sujet est nul ». Toute la promotion, d’environ trois cents camarades, a immédiatement quitté les salles, sans que rien n’ait été prémédité. Le lendemain, le directeur nous réunissait tous dans un grand amphi et nous disait que nous aurions zéro pour l’examen et que cela aurait des conséquences graves pour notre diplôme. Chacune de ses menaces était ponctuée de salves d’applaudissements. En quelques heures, l’autorité avait été réduite à néant. Simultanément, à Paris, la Sorbonne était occupée. Très vite, à HEC, nous avons eu des assemblées générales. Les professeurs étaient dans les gradins au milieu des étudiants. Ils devaient lever la main pour demander l’autorisation d’intervenir. Ils attendaient leur tour pour participer au grand débat sociétal. Je suis allé un soir à la Sorbonne avec mes parents pour participer à ce grand débat spontané. Dans la rue et dans les couloirs, chacun se parlait sans aucune considération d’âge, de statut social, de couleur, de sexe… C’était un rêve éveillé, où toutes les cloisons et les barrières avaient disparu. Il y eût quelques jours de bonheur absolu. Il n’y avait plus d’autorité, plus de revendications sectorielles, plus de jalousie : le temps marquait une pose.

Très vite, les groupes de pression ont repris en main ce mouvement spontané. Les barricades sont apparues et la violence entre manifestants et forces de l’ordre s’est aggravée. La « révolution de mai 68 » était en marche pour quelques jours, jusqu’à ce que, le 30 mai, le général de Gaulle s’adresse au pays en milieu d’après-midi. La vie s’est arrêtée le temps de son allocution. Tous les transistors étaient branchés. Aussitôt le discours fini, la foule s’est rassemblée Place de la Concorde à Paris. La France allait retrouver son calme, mais les messages du peuple aux autorités allaient mettre des années à être décodés. Depuis la fin de la seconde guerre, vingt-trois ans s’étaient écoulés, c'est-à-dire une génération. La guerre d’Algérie était terminée, et il semblait temps de profiter de la vie. Nous allions entrer dans une société de consommation et dans une société de liberté. Au niveau mondial, la contraception allait se banaliser et modifier totalement la vie des femmes et des couples. La génération des « soixante-huitards » va vite se montrer obsédée par son propre plaisir et va vivre son bonheur à crédit, en laissant l’addition des remboursements à ses enfants. J’ai parfois honte de ma génération et de son égoïsme incroyable. La liberté a ses limites, notamment celle des autres. De quel droit, une génération pourrait-elle prendre la liberté de laisser la facture de son bien-être aux suivantes ? Quarante ans après, il faut donc parfois tempérer les slogans de mai 68.

                                                                     Jacques JEANTEUR

                                                                Conseiller régional MoDem

Publié dans Société

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