Laïcité et anticléricalisme.
Lundi 22 septembre 2008
Le voyage de Benoît XVI en France n’a pas laissé indifférent. L’éditorial du Monde, la veille de son arrivée, titrait : « Un Pape chez les laïques » et concluait : « Les religions ont leur place dans la société. Mais, la République est neutre ». Jean Daniel titre son éditorial du Nouvel Observateur : « La laïcité selon Benoît XVI » et il rappelle : « Les Français se sont donné une société laïque marquée par le respect de toutes les religions, de toutes les opinions, mais aussi par la séparation des Eglises et de l’Etat… Née pour contenir l’influence de l’Eglise catholique, la laïcité à la française est devenue une liberté de toutes les autres… Cela dit, que le besoin de croire soit à l’origine du chaleureux accueil fait à Benoît XVI, cela parait évident… Il n’y aurait pas une « raison politique » qui s’opposerait à la fois religieuse car « la raison est dans la nature de Dieu » et c’est donc par elle que l’on va trouver la foi et la vérité » .De son côté, Claude Imbert dans son éditorial du Point « Foi et raison » écrit : « La France, jadis fille aînée de l’Eglise, est devenue fille aînée de la laïcité et fille cadette de l’Islam européen… Il (le Pape) place le questionnement divin non plus au dessus, mais parmi les apanages mêmes de la raison. Il quitte la négation (intenable) des acquis décisifs de la science. Il s’éloigne du créationnisme, accepte de repenser sans œillères l’évolution de l’espèce humaine ».
Cette couverture médiatique a exaspéré beaucoup de laïcs anticléricaux. Leur laïcité est devenue combat contre tout ce qui touche au spirituel et aux croyances. S’il est sain de bien séparer le pouvoir politique de toute religion, quelle qu’elle soit, il est dangereux de ne pas intégrer les réflexions des responsables religieux à celles des autres responsables quand il s’agit de sujets de société. Dominique Quinio dans son éditorial de la Croix écrit : « Traditionnellement, chaque venue d’un pape en France soulève des réactions : égards républicains jugés trop importants, coût du voyage, forces de sécurité déployées : pour certains, ce que l’on doit aux chefs d’Etat, à la flamme olympique ou à un match de football à risque ne vaut pas pour le représentant d’un milliard de catholiques dans le monde ! ».
Au-delà des centaines de milliers de personnes présentes à Paris ou à Lourdes, un moment très fort aura été le discours au monde de la culture au collège des Bernardins. Il a expliqué combien la méditation monastique de la Parole est un modèle de rapport entre foi et raison. Benoît XVI a notamment dit : « La recherche de Dieu requiert donc, intrinsèquement, une culture de la Parole… Le désir de Dieu comprend l’amour des lettres, l’amour de la parole, son exploration dans toutes ses dimensions ». Dans les monastères, le temps consacré à la Parole, c'est-à-dire à la lecture des textes, est aussi important que le temps consacré à la prière ou au travail. C’est en s’instruisant et en méditant que l’homme s’enrichit et développe sa vie intérieure. Il se forge ainsi sa propre foi. Vouloir rejeter cette réflexion au nom d’un anticléricalisme primaire serait dangereux pour notre société.
Jacques JEANTEUR
Conseiller régional MoDem