Le chômage en Europe
Dans son numéro d’Avril, « Alternatives économiques » fait le tour d’Europe de la crise sociale. Ce magazine est particulièrement intéressant par son indépendance. Constitué en coopérative, il n’appartient qu’à ceux qui y travaillent. Ils sont donc indépendants de tout pouvoir politique et d’argent. Ils sont libres par rapport aux courants de pensée. Ils lancent un cri d’alarme devant la crise économique et sociale qui s’aggrave. « Les politiques budgétaires trop restrictives et le renforcement des règles qui les imposent ont replongé l’économie dans la récession et fait exploser le chômage : en février dernier, le cap de 20 millions de chômeurs a été franchi dans la zone euro, soit près de 9 millions de plus qu’en 2008, mais aussi 5 millions de plus qu’en août 2010…Or, les peuples qui souffrent ne sont, eux, guère en mesure d’exercer une réelle pression : les périodes de récession ne sont en effet pas favorables aux mobilisations sociales, elles poussent au contraire au chacun pour soi…La solution de la crise passe nécessairement par un rééquilibrage des politiques économiques qui permette aux pays en crise de sortir par eux-mêmes de la récession ».
Voici des chiffres qui parlent d’eux-mêmes, et qu’il est bon de connaître :
Taux de chômage total : Entre 2008 et 2013, la zone euro est passée de 7,6 % à 11,9 %, avec un chômage des < 25 ans qui est passé de 15,8 % à 24,2 %. Un jeune sur quatre en Europe n’a pas de travail ! Cela ne peut pas durer.
La France est passée de 7,8 % à 10,6 % et les <25 ans de 19,2 % à 26,9 %
L’Espagne est passée de 11 % à 26,2 % et les <25 ans de 24,1 % à 55,5 %
L’Italie est passée de 7,1 % à 11,7 % et les <25 ans de 22,3 % à 38,7 %
Le Portugal est passé de 8,6 % à 17,6 % et les <25 ans de 19,6 % à 38,6 %
La Grèce est passée de 7,3 % à 26,4 % et les <25 ans de 21,2 % à 58,4 %
L’Irlande est passée de 6,1 % à 14,7 % et les <25 ans de 12,3 % à 30,9 %
Les Pays-Bas sont passés de 3,1 % à 6 % et les <25 ans de 6,4 % à 10,3 %.
Au niveau du revenu national brut par habitant, avec comme base 100 l’année 2008, la zone euro est à l’indice 97,1, la Hollande à 98,2, la France à 97,8, l’Espagne à 93,5, l’Italie à 91,9, le Portugal à 91,6, l’Irlande à 85,3 et la Grèce à 77. Parmi les autres indicateurs, on relève que les dépenses publiques de santé, avec comme base 100 en 2008, sont passées en zone euro à l’indice 105,3 en 2011 mais à l’indice 108,2 en France. De même, les dépenses d’éducation, sur la même période, sont à l’indice 104,1 en zone euro, mais 107,8 en France. Nos dépenses continuent donc à augmenter plus vite que dans le reste de la zone euro. Il y a donc des efforts importants à faire pour maîtriser nos dépenses, mais cela doit s’accompagner d’efforts importants pour relancer la croissance. Ces efforts doivent être collectifs en Europe. Même si l’Allemagne peut sembler trop rigide sur ses positions, il ne faut pas en faire le seul bouc émissaire qui cacherait nos insuffisances et notre laxisme sur les dépenses publiques.
Des bonnes nouvelles sont toutefois en train de nous arriver. Ce sont les mesures des ministres des finances du G20 qui exhortent la communauté internationale à mettre en place l’échange automatique d’informations bancaires. Cela devrait permettre progressivement aux Etats de récupérer une partie de l’évasion fiscale des particuliers évaluée par les ONG à plus de 20.000 milliards d’euros. C’est également la démarche commune de Pierre Moscovici et de Wolfgang Schäuble, ministre des finances allemand, pour intensifier la lutte contre le blanchiment. C’est aussi la décision de François Hollande de fermer la porte à toute amnistie sociale. C’est enfin le dernier sondage publié dans « Le Journal du dimanche » qui montre que l’idée d’un gouvernement d’union nationale est plébiscitée par 78% de français. Cela fait longtemps que François Bayrou le réclame. François Fillon et Benoist Apparu viennent de la relancer. François Hollande y est encore hostile, mais il faut espérer que les faits le porteront à évoluer rapidement. Les taux de chômage dramatiques, notamment chez les jeunes, imposent un comportement responsable de nos élus. Le pays est lassé des querelles entre la gauche et la droite, et à l’intérieur de la gauche et de la droite. En regardant les chiffres dramatiques du chômage en Europe du Sud, on ne peut que s’inquiéter du devenir de notre pays si, comme je le réclame depuis fort longtemps, nos responsables ne sont pas capables de taire leurs basses querelles, pour réunir leurs forces dans un gouvernement d’union nationale, avec comme seule priorité la baisse du chômage, synonyme de croissance retrouvée.
Jacques JEANTEUR