Stéphane Hessel
En fin d’année dernière, Stéphane Hessel a publié un petit fascicule qui a eu un succès considérable avec plusieurs centaines de milliers de lecteurs : « Indignez-vous ». En février de cette année, il a complété son message par un petit livre d’entretiens avec le jeune Gilles Vanderpooten : « Engagez-vous ».
Stéphane Hessel est né à Berlin en 1917 d’un père juif écrivain et d’une mère peintre et mélomane. Avec eux, il s’installe à Paris en 1924, et intègre l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm en 1939. Naturalisé français depuis 1937, il rejoint De Gaulle à Londres en 1941. Fin mars 1944, il est débarqué clandestinement en France pour recueillir et transmettre des renseignements destinés à préparer le débarquement. Arrêté sur dénonciation le 10 juillet 1944, il est torturé et parvient à déstabiliser ses tortionnaires en leur parlant allemand, sa langue maternelle. Envoyé au camp de Buchenwald, il parvient in extremis, la veille d’être pendu, à échanger son identité contre celle d’un français, Michel Boitel, mort du typhus. Sous ce nouveau nom, il est transféré au camp de Rottleberode, d’où il s’évade. Repris, il est transféré au camp de Dora, d’où il s’évade pour de bon. Il rejoint Paris pour y retrouver sa femme et ses 3 enfants. Après avoir réussi le concours d’entrée au ministère des Affaires étrangères, il part en poste aux Nations Unies où il devient secrétaire de cabinet d’Henri Laugier, secrétaire général adjoint et secrétaire de la Commission des Droits de l’homme. Il participe alors activement à la rédaction de la Déclaration universelle des Droits de l’homme, qui sera adoptée le 10 décembre 1948 au Palais de Chaillot à Paris. Il siège ensuite au sein de différentes institutions internationales. En 1954, il entre au cabinet de Pierre Mendès France, dont il restera très proche. En 1977, il est nommé par Valery Giscard d’Estaing ambassadeur auprès des Nations Unies à Genève, et il devient ambassadeur de France sous Mitterand. En 1994, il est chargé d’une mission de médiation entre Hutus et Tutsis au Burundi, et en 1996 il est médiateur dans l’affaire des « sans papiers » après l’occupation de l‘église Saint Ambroise. En 2008, il lance un appel pour que le gouvernement français mette des fonds à disposition pour que tous les sans-logis puissent avoir un toit. En 2008 et 2009, il se rend dans la bande de Gaza et témoigne à son retour de la douloureuse existence des Gazaouis.
Dans la conclusion de son fascicule « Indignez-vous », il parle de la menace fasciste et dit : « Non, cette menace n’a pas totalement disparu. Aussi, appelons-nous toujours à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance contre tous. A ceux et à celles qui feront le XXIème siècle, nous disons avec notre affection : CREER, C’EST RESISTER, RESISTER, C’EST CREER. » Dans son message aux jeunes, livré dans son deuxième petit livre « Engagez-vous », il rappelle les valeurs fortes du Conseil national de la Résistance qui ont permis à la France de se relever. « Refuser le diktat du profit et de l’argent, s’indigner contre la coexistence d’une extrême pauvreté et d’une richesse arrogante, refuser les féodalités économiques, réaffirmer le besoin d’une presse vraiment indépendante, assurer la sécurité sociale sous toutes ses formes…nombre de ces valeurs et acquis que nous défendions à l’époque sont aujourd’hui en difficulté et même en danger…Résister, c’est considérer qu’il y a des choses scandaleuses autour de nous et qui doivent être combattues avec vigueur. C’est refuser de se laisser aller à une situation qu’on pourrait accepter comme malheureusement définitive. »Certes, nous ne sommes pas au sortir du drame nazi, mais il est clair que notre société a perdu ses repères et que les jeunes ont besoin de construire leur avenir avec des repères. Chaque génération introduit de nouveaux repères, mais il en est qui ne changent pas avec les générations. Les droits de l’homme et les valeurs morales sont de ceux là. Tous les jours, les violences physiques ou verbales montrent que l’homme est encore le pire ennemi de l’homme. L’anticléricalisme a eu pour but de dénigrer les valeurs fondamentales inscrites dans la Bible. En voulant réduire, avant de supprimer toute culture des religions, et en marginalisant toute démarche de foi, nous en sommes revenus à la période d’adoration du veau d’or, c'est-à-dire de l’argent. Le libéralisme débridé a abouti à la crise financière, fruit d’une crise morale. Elle est loin d’être terminée. Les salaires et avantages indécents des grands patrons de banques ou de grandes entreprises sont autant d’atteintes fondamentales aux droits de l’homme, car il s’agit d’une spoliation du plus grand nombre au profit d’une toute petite minorité de dirigeants cupides. Stéphane Hessel parle de nouvelle « conscience éthique qui doit nous rendre sensibles au fait que ce que nous faisons aujourd’hui a des répercussions sur ceux qui viennent ensuite ».
Le Conseil National de la Résistance a permis le redressement de la France à la sortie de la guerre. Il était le fruit de la résistance aux forces du mal incarnées par le nazisme. Il regroupait tous les résistants, quel que soit leur parti, leur religion ou leur race. Nous avons besoin d’un nouveau Conseil National qui regrouperait les bonnes volontés de gauche, de droite et du centre. Le système binaire ne le facilite pas. Il faut donc passer au dessus et prôner pour les prochaines élections un véritable programme d’union républicaine qui exclurait seulement les extrêmes de gauche comme de droite. Nos leaders en sont-ils capables ?
Jacques JEANTEUR
Mouvement Démocrate